Un texte retranché du Grand Livre

Comme l’encre de ses poèmes sur son papier…

Samedi en fin d’aprèm… L’été est dans mon appartement comme elle pèse sur la ville, l’air est lourd… malgré l’orage… la pluie battante, le vent qui se déchaine, l’air frais de l’après-tempête… malgré TOUT, mon ÂME s’échauffe et mes mots suintent. Je me suis préparé un capucino, j’ai décidé de faire le tri des livres sur ma table de lecture, Estuaire 103, des poèmes très courts d’Annie Dulong et surtout un texte de Gérald Leblanc qui fait l’apologie de Ginsberg. Voilà les deux poètes que je voulais lire avant de ranger le numéro 103. Un peu de Jazz, une samba en portugais, le ventilateur qui tourne et le capucino qui me fait carburer… Voilà! C’est fait! Les textes d’Annie sont très bien, mais le texte de Gérald est accroché au fond de ma gorge, pas moyen de ranger ce volume dans la bibliothèque, cet homme est gravé dans ma mémoire comme l’encre de ses poèmes sur son papier…

Omm Gérald, Ommm Gérald,

Ommmmmmm »

 

Post-scriptum :

Affiché le 15 août 2012, en cette journée de tintamarre et de casseroles…

La réalité et la fiction

Le 15 septembre

Salut mon vieux,

Je viens de relire ton Grand Livre, et une certitude se confirme… ton œuvre est symphonique… ce livre est un opéra célébrant l’amitié, celle que rien n’altère et qui vaut son pesant d’or, le bon vieux temps qui n’est finalement qu’une fable, mais que l’on se remémore toujours avec nostalgie, et la promesse des lendemains radieux, comme lorsqu’à la fin de ton récit, encore jeune homme, tu pars en voiture vers l’Ouest, pour grandir… mais là ne s’arrête pas la comparaison… alors, mon vieux, filons la métaphore ensemble par-delà les mots et l’espace… comme dans tout opéra, tous les chanteurs, peu importe leur importance, font leur tour de chant à un moment ou à autre, du stentor au soprano, du chœur au soliste… et la musique est là bien présente… celle des années soixante, celle de ta jeunesse, et surtout celle de l’amitié… la narration répond elle aussi aux exigences de l’opéra… tout y passe, les arias lorsque les extraits de musique envahissent le texte, les récitatifs lorsque le protagoniste s’épanche sur son cœur, seul dans sa chambre jaune, couleur d’éternité, les chœurs lorsque les autres personnages entrent en scène pour briser la solitude, les intermèdes lorsque le narrateur prend la parole pour ponctuer et épicer le récit. N’oublions pas l’orchestre tantôt symphonique quand l’histoire des quatre amis prend le dessus, tantôt de chambre lorsqu’Albert et Paul-André se retrouvent ensemble… Ajoutons le fameux livret secret dont toi seul es dépositaire et dont tu laisses quelques bribes s’échapper de-ci de-là pour que nous comprenions mieux les enjeux sous-jacents de l’histoire… l’écriture, quant à elle, est tout ce qu’il y a de plus musicale… le cœur de la prose bat sans cesse, suivant au plus près les émotions des personnages, et les tiennes… Finissons, si tu le veux bien, mon ami, avec toi, le chef d’orchestre qui mène avec brio tout son monde, à la baguette, oserais-je dire, et qui, le cœur lourd, ne peut finalement pas s’empêcher de suivre la partition qu’est la vie…

Mon cher ami, tu as livré ici un combat épique, digne des preux chevaliers, combat où deux sœurs ennemies : la réalité et la fiction, ont dû rendre les armes. Tu nous as offert un pur moment d’art lyrique, et je crois sincèrement que ton grand œuvre est bel et bien fini… que la fiction t’attend… Saluons donc, chapeau bas, cet exploit.

Thibault