Vaut mieux tard que jamais…

Pour mes 66 ans, qui sens dessus dessous ferait 99, mon ami m’a offert une place à l’opéra de Montréal. Tout de noir habillés, nous sommes allez voir la première de Madama Butterfly.

Nous sommes de bons amis depuis 1970, 45 belles années, nous sommes rencontrées au moment où nous nous apprêtions à monter sur scène pour la première fois. Il jouait le père de Roger, que nous appelions alors Dédé, tandis que je jouais l’ami de Roger, revendeur de pot de son métier, et que Robert et Pierre chantaient Moé j’viens du Nord ‘stie ! pour la première fois. Notre petit “‘stie” collectif se voulait un cri de rassemblement pour notre “gang” qui se croyait habileté à changer le monde. Et le monde a changé au rythme de notre génération, et nous sommes fiers d’avoir contribué ce beau, d’avoir fait notre petite part… “stie !!!

Tu as raison mon ami, c’est extraordinaire de cheminer dans le sentier d’amitié pendant quarante-cinq années, surtout que l’on peut maintenant jauger l’importance de nos envolées de jeunesse. Heureusement, les beaux gestes ont tendance à faire époque.

Melody-Moore-Cio-Cio-San-©-Yves-Renaud-3-640x360Quel beau spectacle, le décor et les éclairages reflétaient l’âme de la Madama, comme un caméléon dans la nature! Je ne sais pas si nous aurions apprécié cette histoire et cette musique alors que nous n’avions qu’une vingtaine d’années. Comment peut-on comprendre le désarroi de Madama Butterfly, quand on pas encore vécu la douleur tragique du survivant qui voit la mort passer à côté de lui : quand on pas encore perdu un ami, un amant, ses parents ou un fils. Comment peut-on apprécier un aria alors qu’on vibre aux pulsations primales de Led Zeppelin, de In a gadda da vida par Iron Butterfly ou de The Toad par The Cream. La musique de Puccini, la prestation de l’orchestre, du chœur et des solistes, la mise en scène, les costumes, tous les éléments de ce spectacle nous ont préparés à la dernière scène où Madama se suicide dans un élan de désespoir d’amoureuse et d’amour maternel. Pour que son fils puisse vivre, elle choisit de mourir. Même les beaux gestes tragiques font époque.

Le lâche, cet ignoble Monsieur Pinkerton, est entré en scène en trombe, il s’est lancé sur la dépouille de la Madama en beuglant. Il n’est jamais trop tard pour pleurer, même si ce n’est que de remords. Un autre beau geste ? Au théâtre peut-être !, mais dans la vraie vie les remords viennent après qu’il est trop tard. Cela ne fait du bien qu’au coupable !

Merci mon ami pour une si belle soirée, à la prochaine, on recommencera quand nous aurons 99 ans.

***

Paul à québecMardi, en fin d’après-midi, à la représentation des retraités, je suis allé voir Paul à Québec avec ma sœur. Quel beau film, j’ai pleuré du début à la fin! Je n’étais pas seul, toute la salle pleurait, mais les autres spectateurs n’avaient pas vu le beau geste de Madama Butterfly. Donc nous pleurions tous en public pour la famille de Paul, et en secret pour nos petites et grandes tristesses personnelles.

Vaut mieux tard que jamais, c’est sûr, mais ne perds rien à récidiver de temps en temps.

Alors si la vie vous malmènent, aller voir Madame Butterfly ou Paul à Québec.

Publié par

Gaston Tremblay

Poète, romancier, essayiste, éditeur Gaston Tremblay a aussi été administrateur d’organismes artistiques.

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